Pierre Henry

[texte de Michel Chion sur Antiphonie]

 

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Chion, Michel, 1947-, “[texte de Michel Chion sur Antiphonie],” Pierre Henry, accessed June 18, 2024, https://pierre-henry.org/items/show/1301.

Creator

Chion, Michel, 1947-

Description

ANTIPHONIE, 1951
Toujours dans cette tendance d'un retour au papier à musique, il écrit la partition sérielle d'Antiphonie, une œuvre qui, elle, est réalisée peu après. Cette partition est faite «d'un schéma rigoureux, où les durées sont notées avec précision (en centimètres sur la partition). Deux séries de blocs sonores s'opposent à la façon de I'antiphonie du Moyen Age - d'une part des groupes formés de cellules - c'est-à-dire de courts motifs sonores - en renouvellement continuel; d'autre part, une série rigide de douze sons complexes de timbre, de durée, hauteur et ampleur dissemblables. Le tout est traité de manière systématiquement différente. [ .. .] La construction d'Antiphonie est basée Sur des durées rythmiques en équivalence avec la nature du matériau employé. Chaque son traité a son silence complémentaire ».
En clair, cette brève musique fait entendre un contrepoint, très lisible, entre une chaîne sonore de sons hétéroclites qui, collés les uns aux autres, forment une ligne brisée imprévisible et agitée, et, d'autre part, de brefs sons haletants, tombant à intervalles irréguliers, entre des silences également imprévisibles. Même s'il est impossible - comme pour toute œuvre sérielle - de suivre le jeu structurel qui a été la base de la partition, on est emporté par un mouvement spasmodique, sauvage, une espèce de swing irrationnel. Pour sa première utilisation systématique du magnétophone (les sons d'Orphée 51 étaient essentiellement des sons de tourne-disques repiqués sur bande), Pierre Henry a joué à fond de son principal apport : le montage. D'autant plus que la vitesse professionnelle de l'époque (76 cm par seconde), permettait, bien avant les « micro-échantillonnages» pratiqués sur l'ordinateur, de monter les sons en dessous même du seuil où l'oreille est à même de discerner deux phénomènes successifs. Mais ce qui rend Antiphonie très vivant, par opposition à d'autres études sérielles (comme Studie 1 de Stockhausen, faite à la même époque), c'est que son matériau sonore de base est très dynamique, il a une vie de son, il n'est pas un vague bruit impersonnel: et d'autre part. que ce jeu plutôt abstrait avec les durées est pulsé par l'utilisation du silence qui fait rebondir les sons, les magnétise et les charge, atomes éparpillés, d'une tension vivante. C'est une des premières œuvres où Pierre Henry manie systématiquement les rythmes irrationnels (d'une périodicité subtilement irrégulière), ce qu'il fera avec un art de plus en plus raffiné dans ses grandes «études rythmiques» des années 70.

Date Created

2003-10

Production

Publisher

Fayard

Sources

Identifier

http://pierre-henry.org/items/show/1301

Source

Michel Chion, Pierre Henry, Fayard, 2003, p.42-43

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